Matthias Ruetschi, responsable bâtiment et techniques de Services industriels de Genève (SIG) au sujet du programme ECO 21. Un entretien avec Philippe Fixel.
Qui sont les Services Industriels de Genève (SIG) Monsieur Ruetschi ?
Les Service industriels de Genève (SIG) sont un établissement de droit public, ils assurent au quotidien les services essentiels à Genève grâce à leur savoir-faire dans la gestion des réseaux d’énergies, de l’eau, et dans le traitement des déchets. SIG s’engage sur la voie de la transition énergétique, à travers des solutions fiables, performantes, innovantes et respectueuses de l’environnement. SIG propose un accompagnement personnalisé, des formations, des aides financières, pour les propriétaires immobiliers, asset managers et les régies immobilières.
Qui est Matthias Ruetschi ?
Je suis responsable du projet ECO 21 sur la même ligne hiérarchique que deux autres managers principaux sur ce même sujet, chacun de nous trois étant à la tête d’une équipe respective de 10-15 personnes. L’équipe globale, composée de 35 personnes Equivalent plein temps, est supervisée par notre directrice générale ECO 21, madame Pascale Le Strat.
Cher Monsieur Ruetschi, parlez-nous du programme ECO 21 sur la partie immobilière ?
Le programme ECO 21 a pour objectif de générer de l’efficience environnementale et durable sur le parc immobilier Genevois, et de faire en sorte que des actions se concrétisent et soient suivies dans le temps. Que ce soit en termes d’économie d’électricité (KWh), économies en tonnes de CO2 et en mètres cubes de déchets. Nos 3 grands indicateurs clés sont donc : kWh, CO2, et m3 de déchets économisés.
Pour mener à bien nos objectifs, nous nous sommes organisés suivant trois piliers d’actions. Le premier axe concerne les acteurs de l’immobilier tels que les propriétaires immobiliers, les particuliers, les collectivités, les entreprises ainsi que les régies immobilières et asset managers. Avec ces mêmes acteurs, nous mettons en place un protocole, à travers la signature de contrats d’accompagnement. Dans ces protocoles d’ACCOMPAGNEMENT ECO 21, nous fixons ensemble un certain nombre d’objectifs et d’actions à réaliser sur le parc. Aujourd’hui un ensemble de 49 propriétaires, asset managers, et régies immobilières ont signé un accord sous l’égide d’ACCOMPAGNEMENT ECO 21, soit 60% du parc Genevois.
Comment est réalisé le suivi de cet accompagnement auprès des acteurs de l’immobilier ?
Cet accompagnement est retranscrit à travers un tableau de bord : « la base de données ATLAS ECO 21 ». Dans cette base de données sont retranscrites toutes les actions de ECO 21 depuis une dizaine d’années, il est possible d’observer chaque immeuble, et d’analyser quel type d’action a été mené au cours du temps, et de déterminer à un instant « t » le niveau des économies réalisées. Par exemple, une pompe à chaleur de dimension importante pour le chauffage va être changée, ce qui va permettre d’économiser un certain niveau de consommation (en kWh). Par voie de conséquence, le locataire est mieux informé sur les travaux en cours ou à venir (à Genève plus de 80% de locataires), ce qui permet d’introduire un dialogue entre le propriétaire immobilier et les locataires, supervisé par une personne de SIG. Ce qui fonctionne très bien, les propriétaires en sont friands, car cela permet d’établir un contact privilégié et permet d’éviter les tensions en cas de hausse de loyer.
« L’efficience énergétique dépend de deux facteurs, la performance intrinsèque (enveloppe et installations) et la performance locataire (comportement du locataire). »
Que doivent payer ces acteurs pour ce suivi d’analyse du parc ?
Cette approche est gratuite, pour les propriétaires qui signent une convention avec nous, sur des scénarios ambitieux du point de vue énergétique.
Quelles autres actions sont menées ?
Le second axe concerne l’enveloppe de l’objet SOLUTION RENOVATION 21 qui est un travail en lien avec nos partenaires métier. Nous travaillons en collaboration avec les professionnels installateurs (électriciens, chauffagistes, …). Ces travaux menés au niveau de l’enveloppe de l’objet, représentent plusieurs millions d’investissements, on a développé des prestations d’assistance à maitrise d’ouvrage énergie. Un ingénieur-architecte intervient en avant-projet, pousse le plus loin possible les ambitions d’un point de vue technique. Ensuite un audit technique est réalisé, pour observer s’il n’y pas de pont thermique, de malfaçons, puis dans un troisième temps jusqu’à trois ans après la mise en œuvre de l’exploitation répondre aux ambitions définies au préalable.
Enfin existe-il une action menée avec les locataires ?
Oui car l’efficience énergétique dépend de deux facteurs, la performance intrinsèque (enveloppe et installations – vu plus haut) et la performance locataire (comportement du locataire). Une fois, le plan d’accompagnement mis en place avec les propriétaires, le comportement des locataires est primordial pour avoir un double effet positif sur la maitrise des énergies, du point de vue technique et des consommations. C’est pourquoi nous avons développé, un dernier volet sur une assistance à maitrise d’usage des locataires particuliers en complément de nos actions ECO LOGEMENT 21. Cette mission d’information permet d’impliquer les parties prenantes, à travers des visites individualisées, de contacter les concierges et les habitants sur l’amélioration potentielle de l’efficacité énergétique.
Quel a été l’historique du projet ECO 21 global et comment en êtes-vous arrivés à ce succès ?
Sur le projet ECO 21 ces dernières années, grâce à la pénurie, grâce au climat on a eu peu de peine à convaincre les acteurs d’entrer dans le programme. Historiquement, c’était plus difficile, il y avait de la méfiance pour un programme qui était nouveau. On a toujours commencé nos projets en faisant des pilotes. Pour ce projet nous avons commencé avec certains propriétaires clés et grands institutionnels, qui avaient envie aussi de faire la transition énergétique. Nous avons décidé de mettre en place des pompes à chaleur air – eau sur des bâtiments de moyenne et grande importance et de le réaliser ensemble. Ce qui a engendré beaucoup d’études et de projets de recherches & thèses. Ce qui ne s’était pas fait jusqu’alors.
Quelles sont pour vous les prévisions, pour la Suisse, en termes de volume de kWh disponibles cet hiver 2022 / 2023 ?
Sur les tendances du marché Suisse en volume de distribution et de consommation : ce qui se dit pour cet hiver : « cet hiver, ça va passer c’est bon ». Il y a eu de tels cris d’alarme en septembre, que tout le monde a rempli les cuves à Mazout. Beaucoup d’installations bicombustibles Gaz – Mazout ont été réalisées, et tout le monde a réalisé des stocks de Mazout. Les fournisseurs d’énergie Suisses, dont SIG, ont acheté énormément de gaz. Il est vrai que les 8 degrés en plus mesurés en température diurne sur le mois d’octobre sur toute l’Europe favorisent la gestion et le pilotage. Le seul risque devrait se limiter à des microcoupures isolées.
Quelles sont pour vous les prévisions, pour la Suisse l’année prochaine ?
En revanche, pour l’hiver prochain, on se retrouve à nouveau dans une problématique d’approvisionnement, on doit penser et organiser « l’accélération du renouvellement des installations techniques pour préparer le prochain hiver ». Les professionnels de l’installation ne sont pas encore prêts pour faire face à cette vague.
Auteur : Philippe Fixel